C’est une vieille règle de la politesse, qui date de l’époque où les
messieurs portaient chapeau : on se découvre devant une dame !
C’est un temps où les ouvriers ne portaient pas chapeau, mais casquette. La
règle s’appliquait néanmoins. Ôter son couvre-chef était de la part des
hommes, une marque de déférence. On se découvre devant les dames ; on se
découvre à l’église...
La règle a disparu en même temps que l’usage social du chapeau ; par l’effet,
aussi, sans doute, du cinéma américain. Le chapeau du cow-boy reste bien
vissé sur sa tête. Celui du détective des films noirs également.
Quand la mode est revenue de la casquette, dans la jeunesse des banlieues, il
s’est trouvé de nombreux professeurs pour ressortir la vieille règle. Ils
imposeraient leur autorité en classe en demandant fermement aux lycéens de se
découvrir. Comme à l’église.
Nicolas Sarkozy, Monsieur Kärcher, veut lui aussi que l’on soit bien polis.
Et lorsqu’il parle de la République, avec une majuscule appuyée sur la lettre
initiale, le voilà qui explique qu’elle est
« celle qui veut une école de
l’autorité et du respect, où l’élève se lève quand le professeur entre, où
les filles ne portent pas le voile, où les garçons ne gardent pas leur
casquette en classe ... » [3]
Cherchez l’erreur.
On se demandait bien pourquoi il fallait à tout pris dévoiler les élèves qui
prétendaient couvrir leur chevelure. Signe religieux ostensible ? Non, simple
incivilité. Comme le fait de ne pas se lever quand le professeur entre dans
la salle. Comme le fait de garder sa casquette dans le sanctuaire scolaire.
C’est une question de couvre-chef. Et d’ailleurs, de nombreux établissements
scolaires ont ajouté, après la loi du 15 mars 2004, une clause à leur
règlement intérieur pour prohiber le port de tout couvre-chef.
Mais voilà : cette vieille règle de politesse était le fait d’une société
très patriarcale ; et l’obligation de se découvrir n’incombait pas aux
femmes. À l’heure du féminisme avancé, c’est chose faite.
Chapeau !