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De Valls à Cazeneuve : une année meurtrière à la frontière

Décompte des décès d’exilés à la frontière britannique

par Passeurs d’hospitalités
4 novembre 2014

Le Ministre de l’Intérieur est venu le 3 novembre à Calais présenter un « accueil de jour » en réalité bien peu accueillant. Selon le GISTI, il semble avoir avant tout comme fonction « d’éloigner migrantes et migrants du centre de la ville et de les assigner à l’invisibilité ». Face à ce dispositif prétendûment humanitaire, nous publions ce sinistre bilan de la politique répressive à laquelle se réduit désormais l’action du gouvernement Valls.

Au long de ces derniers mois se sont succédés les décès d’exilés à la frontière britannique, plus que n’importe quelle année.

Les associations ont commencé à signaler l’augmentation des prises de risque par les exilés pour franchir la frontière, et l’augmentation du nombre d’accident qui en résultait, dès l’été 2013. Mais c’est l’arrivée d’exilés venus de Libye en traversant la Méditerranée, en nombre de plus en plus importants, et souvent sans argent ou presque, qui va aggraver le phénomène. Les Érythréens et les Éthiopiens en particulier, qui étaient devenus entre-temps très peu nombreux à Calais et avaient perdu leur place dans l’économie du passage, ont dû se replier vers les possibilités de passage les plus hasardeuses et les plus risquées. Ce sont eux – et elles – qui ont payé le prix fort en terme d’accidents et de morts.

Les autorités, alertées par les associations, n’ont rien fait pour empêcher les morts. Au contraire, les renforts policiers qui ont été déployés ont aggravé les choses.

Les décès sont devenus plus rares lorsque les exilés sont devenus plus nombreux, et qu’ils ont utilisé leur nombre pour encercler les camions, forcer l’entrée des parkings et dérouter la police et la sécurité. Cette tactique était aussi un moyen de préservation de la vie de chacun.

La police s’est réorganisée et a reçu des renforts. La prise de risque est redevenue plus importante chez les exilés, et le nombre de morts augmente à nouveau.

La situation matérielle catastrophique, le harcèlement policier en ville ou à la gare, les mesures d’exclusions prises par la mairie, les réactions d’hostilité de plus en plus visibles par l’extrême-droite, l’aggravation des violences policières, mettent les exilés sous pression et poussent à la prise de risque.

Le renforcement de la sécurité du port et les nouveaux renforts de police auront deux conséquences : un pouvoir accru des passeurs, qui avaient été en grande partie marginalisés par les exilés ces derniers mois, et plus de morts.

Il n’y a qu’en proposant des solutions à la situation des personnes qu’on pourra trouver une issue positive à la situation des exilés à la frontière britannique.

Robiel Habton, 24 ans, venu d’Érythrée, mort le 9 octobre 2013 en essayant d’entrer dans le port à la nage.

Yemani Gebrenegous Eokbo, venu d’Érythrée, mort dans la nuit du 9 au 10 décembre 2013 d’une maladie cardiaque chronique, alors qu’il ne réussissait pas à obtenir à Calais le traitement dont il avait besoin.

Un exilé, 17 ans, venu d’Iran, mort dans la nuit du 30 au 31 janvier 2014, fauché sur l’autoroute, le chauffeur ne s’est pas arrêté.

Un exilé, 30 ans, venu d’Iran, mort dans la nuit du 2 au 3 février 2014, tué d’un coup de fusil.

Un exilé, une vingtaine d’années, venu d’Albanie, mort le 9 mars d’un coup de couteau sur un parking d’autoroute au sud de Calais.

Mesfin Germa, venu d’Éthiopie, mort le 12 mars 2014 fauché par un véhicule sur l’autoroute, le chauffeur ne s’est pas arrêté.

Senay Berhay, venu d’Éthiopie, retrouvé mort dans le canal le 14 mars 2014, il avait disparu et ses amis le cherchaient depuis plusieurs jours.

Un exilé, venu d’Éthiopie, mort le 15 mars 2014 écrasé sous le chargement du camion qui l’emmenait dans la mauvaise direction.

Mengs Mehdane, 16 ans, venu d’Érythrée, mort le 5 mai 2014 en sautant du camion qui l’emmenait dans la mauvaise direction.

Youssef Haroun, 18 ans, venu du Soudan, mort le 23 mai 2014 en essayant de se glisser sous un autocar sur un parking.

Ahmed Abdallah, 16 ans, venu du Soudan, mort le 23 juillet sur le sol britannique en tombant du bus sous lequel il était caché.

Un exilé, venu du Soudan, mort le 26 septembre 2014 noyé dans le canal lors d’une bagarre.

Sara, 16 ans, venue d’Éthiopie, morte dans la nuit du 20 au 21 octobre 2014 fauchée par une voiture sur l’autoroute.

Un exilé, venu du Soudan, mort le 22 octobre 2014 en sautant d’un pont sur un camion.

Afom, 26 ans, venu d’Érythrée, mort le 25 octobre 2014 après neuf jours de coma, il avait été renversé par une voiture quand il revenait du commissariat de Coquelles après une arrestation.

P.-S.

Cet article a été publié sur le site Passeurs d’hospitalités. Nous le reproduisons avec leur autorisation.