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La chasse à la Licorne bleue

Variation autour de la délicate question de la « lutte contre le communautarisme »

par Laurent Lévy
19 juillet 2005

Dans une assemblée d’intellectuels de gauche, une intervenante demande à brûle-pourpoint : « La question que je me pose est : Comment lutter contre le communautarisme ? ». Et voici l’auteur de ces lignes qui laisse vagabonder son esprit. Sur ce modèle, ne pourrait-on pas poser bien d’autres questions ? Et par exemple : « Comment capturer la licorne bleue ? ». La réponse n’est pas évidente...

Pour capturer la licorne bleue, on peut envisager de tendre des filets sur les lieux habituels de son passage. Mais il faut savoir tisser des rets assez discrets et assez solides pour ne pas que la licorne les remarque ni ne les déchire. L’art de leur confection est difficile ; la tradition s’en perd. Leur coût peut s’avérer prohibitif, et leur installation fort délicate.

Il faut par ailleurs avoir une bonne connaissance de l’habitat de la licorne, de ses habitudes, aussi ; savoir où et quand elle se déplace, suivant quels trajets, etc.

Le même genre de difficultés se pose à l’idée de pièges. On peut en effet imaginer creuser sur son chemin des fosses où la licorne tomberait. Mais là encore, la solution est boiteuse : ou c’est la licorne qui pourrait bien le devenir, si elle se casse une patte en tombant. Elle risque en outre de se débattre lorsque l’on tentera de la récupérer, et la licorne blessée, la chose est connue, n’est pas sans danger.

Une autre solution consisterait à l’endormir par quelque procédé chimique. Mais les fusils à seringue, bien adaptés à la capture des éléphants, sont à l’évidence trop puissants pour les licornes. Toute erreur dans la visée pourrait mettre en danger sa vie même. Le point d’impact pourrait être trop douloureux. Les vétérinaires sont au demeurant partagés sur l’anesthésiant à mettre en œuvre. Trop fort, il peut être fatal. Trop léger, il sera inefficace. La recherche pharmaceutique doit encore se poursuivre, et de nombreux essais doivent être pratiqués.

Attirer la licorne par des appâts à son goût semble une idée pertinente. Mais on ne sait guère, à vrai dire, ce qui pourrait l’attirer assez pour étouffer sa méfiance naturelle. Car la licorne est farouche. Elle se laisse mal approcher et connaître. Elle lance en permanence aux chasseurs des défis qui semblent bien insurmontables.

Il faut s’y résigner : seules des études approfondies permettraient de trouver le moyen de capturer la licorne bleue ; et ces études restent à faire. Sans doute en va-t-il de même des moyens de combattre le communautarisme. Mais on ne peut filer plus longtemps la métaphore, à cause d’une limite trop notable à l’analogie. On sait en effet bien ce qu’est la licorne : Un genre d’antilope pourvue au milieu de son front d’une unique corne à torsade, et à la robe bleue.