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Le collectif Les mots sont importants vous offre une leçon de sexisme respectable

Avec concours précieux, et à vrai dire irremplaçable, du quotidien Libération

par Collectif Les mots sont importants
28 février 2011

Ami lecteur masculin, si tu es un gros porc sexiste mais que tu ne l’assumes pas tout à fait, nous avons la solution à ton problème : un abonnement d’un an à Libération ! Si tu n’as pas été convaincu par la récente Une topless consacrée à la mort de Maria Schneider, qui joignait si élégamment l’utile à l’agréable, le chic au choc, le cachet cinéphilique des Cahiers du Cinéma aux émois salaces de Playboy et FHM, voici un nouvel échantillon gratuit, consacré cette fois-ce à la dernière cérémonie des Césars, et plus précisément au triomphe du violeur de Samantha Gailey-Geimer : Roman Polanski, qui a décidément beaucoup d’amis. Cette nouvelle offre gratuite achèvera de te convaincre : si tu t’abonnes et si tu lis régulièrement ce prestigieux quotidien, tu apprendras en douze mois à dégrossir, policer et euphémiser tes paroles sans renoncer en rien à la joie de mépriser les femmes.

Ami sexiste, ne dis plus :

« C’est quand même pas les pleurnicheries d’une petite allumeuse de treize ans qui vont nous empêcher de célébrer un Grand Homme de la Grande Famille du Grand Cinéma d’Auteur ! La petite salope yankee a eu beau jouer les ingénues, elle savait très bien à quoi s’attendre en acceptant une séance de photos avec un tel Don Juan, et puis elle aurait quand même pu se douter que le Facétieux Génie Européen allait glisser quelques pilules de méthaqualone dans ses verres de champagne, et puis merde, faut pas déconner, il y a quand même des expériences plus traumatisantes qu’une petite cuite, un petit trip et une petite sodomie (fût-elle, comment dire, pas tout à fait consentie) avec un si Grand Artiste… »

Dis plutôt :

« The Ghost Writer, dont le montage a été bouclé alors que Roman Polanski était "en taule" en Suisse, comme l’a rappelé avec émotion le cinéaste franco-polonais, repart avec quatre trophées : meilleur réalisateur pour son auteur, meilleure adaptation (d’après un roman de Robert Harris), meilleure musique pour Alexandre Desplat et meilleur montage. Pour Polanski, 77 ans, cette soirée a sonné comme un retour parmi ses pairs après les épreuves judiciaires de l’année passée, liées à des faits vieux de près de 30 ans. »

(Libération, 26 février 2011)

P.-S.

Pour précision : l’« épreuve » de la « taule » qui a tant « ému » Roman Polanski aura duré deux mois, entre septembre et novembre 2009. Si l’on ajoute 47 jours d’incarcération au moment de la plainte en 1977, on arrive à un petit peu plus qu’un trimestre d’emprisonnement, pour avoir drogué et violé une adolescente de treize ans, puis s’être soustrait à la justice... mais c’était, il est vrai, « il y a plus de trente ans » !