Tout est dit dans le titre de l’émission, qui révèle son parti-pris, ou plutôt le parti-pris de toute la mediasphère dominante : Leonarda n’est pas le prénom d’une adolescente de quinze ans, raflée lors d’une sortie scolaire, expulsée dans un pays dont elle ne connaît pas la langue, et sommée de choisir entre l’exil sans le droit à l’éducation et l’éducation sans le droit à vivre en famille. Leonarda n’est plus la victime d’une violence d’Etat inouïe.
Leonarda devient, dans la novlangue ridicule de nos politologues férus de neutralité et de stratégies, petites phrases et bruits de couloir, le nom d’un piège. Un piège pour nos pauvres petits gouvernants, confortablement installés dans leurs grands et beaux appartements parisiens, mais obligés, par la très grande faute de la très vilaine Leonarda, de revoir leurs petits calculs électoralistes, et de prendre en compte à la fois un électorat raciste, essentiellement lepéniste, à gagner, et une jeunesse antiraciste à ne pas perdre.
Leonarda devient le nom d’un piège et tout est dit, pour être plus clair, sur le cas que se font les commentateurs autorisés de la vie réelle des gens, dès lors que ces gens ne sont pas tout à fait normaux – entendons par là : comme eux, c’est-à-dire bien français, tout blancs, très riches, pas très musulmans, et si possible de sexe masculin. Tout est dit sur leur capacité d’empathie et d’identification. Tout est dit sur leur prétendue neutralité, sur leur prétendue objectivité. Tout est dit sur la solidarité organique qui lie ces grands médias, et chacun de ses serviteurs, à une caste dirigeante dont, espérons-le en tout cas, les jours sont comptés.