Cette fois-ci, donc, les malheureux « usagers » ne sont plus seuIement pris en otage, mais menacés d’extermination !
Merci donc au Parisien, et à son édition nationale Aujourd’hui en France, d’avoir proposé « un guide de survie », permettant (je cite toujours la Une) de pouvoir « se déplacer, travailler, aller à l’école, faire garder ses enfants », et enfin « se soigner » ».
Qu’on me comprenne bien : ces questions existent, et il n’est pas illégitime qu’un quotidien y réponde.
Ce qui en revanche est remarquable, singulier, et questionnable, est le fait d’accorder la Une à cette question, en occultant la question de fond : celle de la liquidation du système de retraites, et de la paupérisation massive qu’elle programme, en fin de vie, pour les générations présentes et futures.
Ce qui est remarquable surtout, et questionnable, c’est le choix de ce mot très chargé, survie, qui assimile une série de désagréments plus ou moins lourds à une situation de menace extrême où il serait question de vie ou de mort.
Le procédé se nomme une hyperbole, et l’effet de stigmatisation (des grévistes en l’occurrence) est lui aussi hyperbolique.
Qu’on me permette donc , pour finir, de poser quelques questions.
Si I’on veut absolument parler de survie, quid de la survie du système de retraite par répartition ?
Quid de la survie à laquelle tant de retraité.e.s seront condamné.e.s du fait d’une pension réduite de 10%, 20%, 30% ou plus ?
Quid de tous ces enseignants qui risquent de se trouver, à l’âge de la retraite, avec une pension proche du SMIC ?
Quid de la survie à laquelle vont être condamnées tant de femmes, autres grandes perdantes d’une réforme qui en fait beaucoup ?
Quid de la survie des chibanis ?
Quid de la survie des gilets jaunes blessés, mutilés, éborgnés, victimes d’une répressions sans précédent depuis au moins quatre décennies ?
Et pour finir : la survie de ces journaux, Le Parisien et Aujourd’hui en France, assurée par de très grasses subventions (à hauteur de 10 millions d’euros annuels [1]), financées par nos impôts, on en parle ?
Que ces gens sachent, en tout cas, que le jour où ces perfusions ne suffiront plus, et où pour cette presse se posera réellement la question de la survie, le souvenir de cette Une survivra lui aussi. Et que nous nous soucierons alors de la survie de cette presse servile autant que celle-ci se sera souciée de notre propre survie, et de celle de nos retraites.