Jean-Michel Mension, plus connu sous son pseudonyme Alexis Violet, s’est éteint à 70 ans. Sa formidable autobiographie, « Le Temps gage » (Editions Noesis), témoigne d’une vie riche en aventures esthétiques, politiques et amoureuses, et d’un humour à toute épreuve. Juif athée, « voyou », « dragueur », « intellectuel précaire » avant l’heure, situationniste « d’époque » avant d’être excommunié par Guy Debord pour son manque d’esprit de sérieux, Jean-Michel devenu Alexis s’est très vite reconnu dans l’idéal communiste qui était la « religion » de sa famille, sans pour autant se soumettre aux dogmes et aux petits chefs que son tempéremment - et son passage par les maisons de redressement - lui faisait fuir.
Adhérant à la LCR dès les débuts, il garda toujours une absolue indépendance d’esprit et une profonde capacité d’empathie avec les opprimé-e-s, quel-le-s qu’il-elles soient, qui l’amenèrent à être de tous les combats, y compris les plus « difficiles », « complexes » ou « inopportuns » aux yeux des grandes et moins grandes organisations de gauche - extrême ou moins extrême, la sienne comme les autres. Anticolonialiste de la première heure, c’est lui notamment qui, au lendemain du crime d’Octobre 1961, inscrivit sur les quais de la Seine, en énormes lettres majuscules :
« ICI ON NOIE LES ALGÉRIENS ».
Plus récemment, il fut l’un des premiers et plus fidèles soutiens des luttes du MIB contre la double peine ou contre les crimes policiers ; un opposant de la première à la dernière heure à la stigmatisation des élèves voilées et à toute mesure de prohibition à leur encontre ; un signataire de l’Appel des Indigènes de la République à une époque ou le Bureau Politique de son organisation déclarait le texte stérile, dangereux, voire raciste. C’est lui encore que l’on retrouve à l’initiative de l’Observatoire des Libertés Publiques, avec un autre grand militant : Maurice Rajsfus. Toutes celles et ceux qui ont croisé un jour Alexis savent que ces quelques lignes sont à la fois insuffisantes et déjà trop « sérieuses » pour rendre à ce grand monsieur l’hommage qu’il mériterait.