« Une vieillesse française » (Par Patrick de Saint-Exupéry) [2]
Il est des critiques de livres que l’on se réjouit de faire. Il en est d’autres que l’on préfèrerait ne pas avoir à faire. Tel est précisément le cas. C’est que de Noires fureurs, blancs menteurs, le livre en questions, il n’est guère à tirer, excepté l’outrance et le fumet nauséeux. Saisi d’effroi au bout de quelques pages, le lecteur initié aura bien du mal à aller jusqu’au terme de sa lecture. Quant au novice, il finira rapidement épuisé, tant Pierre Péan, l’auteur, semble avoir une pensée à l’image de sa plume : confuse et hachée.
En quelques mots, que veut démontrer Péan ? Deux points basés sur un postulat. Le postulat ? L’histoire récente du Rwanda est truquée. Sur cette seule base, ressortant de l’acte de foi, le voici lancé à la poursuite de ses deux obsessions :
1/ les victimes du génocide ne sont pas les victimes, mais les coupables ;
2/ François Mitterrand, alors responsable de la politique française, était un humaniste méconnu.
Le problème, c’est que tout au long de cette soi-disant « enquête » (tel est l’intitulé du livre retenu par l’éditeur), l’auteur franchit allégrement, et avec une inconscience sidérante, toutes les lignes rouges. Sur un fond haineux, il n’hésite à aucun moment à tordre le cou aux faits, à mélanger la plus pure affabulation à quelques éléments factuels déjà connus, ou à broder d’imaginaires interprétations. Il ne s’agit visiblement pas pour Péan d’enquêter mais de démontrer. A tout prix. Au prix même du risque de la propagande.
Deux remarques à l’appui. Pierre Péan ne s’est pas rendu au Rwanda, ce qui est gênant quand l’on prétend démontrer une « immense manipulation ». De même, tout à sa volonté de stigmatiser une prétendue « cinquième colonne » - dont l’auteur de ces lignes - il n’a pas pris la peine de décrocher son téléphone avant de mettre en cause ses « cibles ».
Le résultat est écœurant et ressort du libelle, ces petits écrits à caractère diffamatoire qui pullulèrent en Europe dans la première partir du XXème siècle. Le général Dallaire, patron des forces de l’ONU au Rwanda est ainsi décrit comme un homme qui « méprise les africains francophones » et à la partialité avérée car il aurait « hébergé une Tutsi sous son toit ». Madeleine Mukamabano, journaliste de RFI, ayant perdu une partie de sa famille lors du génocide, aurait, elle « parfaitement » usé et joué du « rôle de rescapée de la barbarie hutu » afin de « séduire et convaincre les personnalités françaises ». Quant à Imma T. (une Tutsi, bien sûr), supposée mystérieuse espionne, Pierre Péan expédie son cas en quelques mots d’une redoutable et exécrable violence : elle « parlait bien et pleurait facilement ».
L’auteur, tout à sa tâche et à sa volonté de violence, exprime également sur un ton qui se voudrait de l’évidence les pires clichés : les Tutsi, victimes du génocide, sont ainsi supposés constituer une « race » dont un trait de caractère serait l’immémoriale « culture du mensonge ». Cette « race » serait également parvenue à former « un lobby Tutsi » à la redoutable efficacité puisqu’elle dirigerait ses « très belles femmes » vers « les lits appropriés ».
L’outrance de l’ensemble est telle que l’on en finit par se demander si la véhémence et la provocation ne sont pas volontaires. L’émotion, la polémique et le scandale visiblement recherchés par Péan créent nécessairement un trouble. Et ce trouble à l’immense avantage de permettre de gommes toutes les épineuses questions de ce dossier, dont la moindre n’est pas celle du rôle de la France au Rwanda.
Finissons-en là. Pour relever deux points qui resteront longtemps - cela est écrit - source d’étonnement et de réflexion :
1/ sans le moins du monde s’interroger, une partie de la presse française a largement ouvert ses micros et ses colonnes à Pierre Péan ;
2/ selon Le Canard Enchaîné, la « perception » par « l’entourage de Villepin » de la crise rwandaise « n’est pas éloignée de celle de Péan ».
Un exemple caricatural de « négationnisme » (Par Jean Chatain) [3]
Présenté comme le livre qui établit enfin « la » vérité historique sur le génocide de 1994 et l’opération« Turquoise » au Rwanda, l’ouvrage de Pierre Péan (aux éditions des Mille et Une Nuits) vise essentiellement à faire contrefeu aux révélations publiées ces dix dernières années concernant les jeux plus que troubles de l’Élysée entre 1990 et 1994. La thèse structurant l’ouvrage est issue du discours officiel de Paris, celui là même que Monique Mas, auteur de Paris-Kigali 1990-1994 (Éditions L’Harmattan), résumait par cette formule en sous-titre : « Lunettes coloniales, politique du sabre et onction humanitaire pour un génocide en Afrique »... Seulement cette « onction » a désormais du plomb dans l’aile et ne peut plus servir comme vérité d’évangile. Pierre Péan choisit donc une autre tactique, héritée de l’extrême droite française d’avant-guerre, celle d’un Léon Daudet ou d’un Lucien Rebatet, multipliant les sous-entendus personnels à l’encontre de tel ou tel adversaire afin de déconsidérer son discours et, si possible, de le déshonorer personnellement.
Quelques exemples tirés de cet indigeste pavé aux relents racistes :
Deux auteurs français, François Dupaquier et Jean-Paul Gouteux, sont déclarés hors jeu par cette « révélation » se voulant assassine : « marié avec une Tutsi ».
Jean Carbonare - qui avait, l’année précédant les massacres, dénoncé la préparation méthodique de ceux-ci par les autorités alors en place à Kigali, sous les yeux des coopérants militaires français - « a recouvré d’anciens réflexes, ceux qu’il avait quand il militait pour le FLN et contre la France ». Bref un homme venu de « l’anti-France », jadis vitupérée par Michel Debré.
Le chercheur Jean-Pierre Chrétien, « idéologue pro-Tutsi », n’est rien d’autre que « le cachet universitaire des sornettes du FPR ». François-Xavier Verschave (récemment décédé), un « paranoïaque ».
Un délire qui s’étend aux institutions : RFI est-elle bien toujours « la voix de la France ou (celle) de Kagamé ? », s’interroge Pierre Péan, relevant que, outre Monique Mas, y officient « deux Rwandais d’origine tutsi ».
Jusqu’au général des casques bleus Roméo Dallaire, dont on insinue qu’il ne restait pas insensible au charme des femmes tutsi. Il est vrai que l’officier canadien a publié un témoignage où il se montre critique sur le rôle de Paris comme sur les complaisances et hésitations onusiennes...
La seule raison de parler ici d’un tel livre ne tient pas à son contenu (une compilation de ragots et de rumeurs distillés par des personnes proches de divers services occidentaux), mais à la campagne de promotion accompagnant son lancement. Sans doute n’est-ce pas seulement une coïncidence si celle-ci survient à un moment où la vie politique est agitée par certaine loi vantant les « bienfaits » de la colonisation française.
Un pamphlet teinté d’africanisme colonial (Par Jean-Pierre Chrétien) [4]
L’ouvrage de Pierre Péan se présente sans ambages comme une somme conduisant à une révision du discours habituel sur le génocide des Tutsis au Rwanda. Revisiter un domaine de recherche est un travail familier aux historiens. Il suppose une discussion sérieuse des écrits antérieurs, complétée par une argumentation fondée sur des documents nouveaux ou des approches nouvelles. Ce n’est pas la « méthode » choisie dans ce pesant pamphlet.
La sélection et l’utilisation des sources sont stupéfiantes. Leur choix est pratiquement unilatéral : acteurs politico-militaro-policiers rwandais ou français impliqués dans la politique de Kigali entre 1990 et 1994 ; quelques auteurs fascinés par les a priori ethniques ou raciaux dans le traitement des sociétés africaines ; pamphlets des amis... Des centaines de publications sont jetées aux orties.
Le rapport fondamental rédigé par l’historienne Alison Des Forges (Aucun témoin ne doit survivre) est ignoré, peut-être parce qu’elle a le tort d’être américaine.
Les références sont souvent incomplètes ou inexactes (des textes non datés), on fait dire à des auteurs ce qu’ils ne disent pas exactement, pour mieux « prouver ». Des archives fermées au public (celles de la présidence de la République pour les années 1990) sont brandies et non scientifiquement exploitées dans le cadre d’un débat contradictoire.
L’histoire du Rwanda se réduit à l’étalage des clichés raciaux les plus obsolètes de l’"africanisme » colonial et de l’idéologie « hamitique » (vieille doctrine, produit de l’africanisme du XIXe siècle, qui tend à opposer des « vrais » Africains aux populations mêlées venues du Proche-Orient ou de la région du Nil) : au lieu des travaux fondamentaux publiés durant les dernières décennies, le lecteur a droit à un mémoire présenté au Tribunal pénal international pour le Rwanda pour la défense d’un bourgmestre génocidaire par un Rwandais décrété « historien » et à un opuscule publié en 1940 par un administrateur colonial belge qui expliquait que « les grands Tutsis n’étaient pas des vrais nègres ».
La complexité de cette tragédie appelle des réponses complexes, elle relève ici du schéma simpliste d’une histoire complot. La sensation prime sur la réflexion, et elle est des plus douteuses. Les auteurs, chercheurs, journalistes, équipes scientifiques et associations humanitaires qui ont contribué à identifier, analyser et dénoncer le génocide de 1994 sont disqualifiés à moindres frais, à coups d’attaques personnelles, dérisoires et sordides, d’insultes et de « citations » partiales tirées de leur contexte.
Effets de manches et sabre d’abattis. Jadis les « chers professeurs » étaient vitupérés par des politiciens que tout le monde a oubliés, aujourd’hui ils sont des « idiots utiles » et des « agents du Front patriotique rwandais (FPR) » : nouvelle variante de « l’anti-France » !
Un autre aspect est stupéfiant, quand on connaît la propagande rwandaise, qui, entre 1990 et 1994, a préparé et accompagné le génocide, telle qu’elle ressort de collections exhaustives de journaux et d’enregistrements dont l’existence accablante suscite, on le comprend, la colère de certains.
Les propos de cet auteur sont comme en écho avec ce discours de la haine : réduction ethno-raciale du débat politique ; bréviaire raciste sur le don congénital des Tutsis dans le mensonge et sur leur instrumentalisation des femmes ; dénonciation des démocrates hutus qui s’étaient engagés courageusement contre la dictature et le carcan ethniste comme autant de vendus ; fantasme d’un complot régional hima-tutsi, ressassé depuis quarante ans par des cercles extrémistes et digne du montage des Protocoles des sages de Sion ; culture de violence et de mensonge où le génocide était à la fois justifié et nié.
Comme disaient l’organe raciste Kangura ou la Radio des Mille Collines, ces Tutsis se suicident... Dans sa furie contre les « agents du FPR », l’auteur n’hésite pas à se fier aux dires d’un ancien fondateur du parti extrémiste Coalition pour la défense de la République, aujourd’hui en France et qui à l’époque s’était exprimé dans ces médias.
Le débat est normal sur les conditions et les causes, lointaines ou proches, du génocide, sur la sociologie des tueurs, sur les zones d’ombre du contexte politico-militaire, au Rwanda comme à l’extérieur.
Des enquêtes transparentes et publiques sont nécessaires, y compris, évidemment, sur l’attentat du 6 avril 1994 (contre l’avion du président rwandais Juvénal Habyarimana et son homologue burundais Cyprien Ntaryamira) et sur les hypothèses et les « révélations » qui sont périodiquement distillées ou annoncées. L’ambiance de guerre secrète qui entoure ces questions graves est intolérable.
La défense de la France en Afrique est vraiment mal partie si elle doit s’appuyer sur le livre de M. Péan, qui, par ailleurs, semble étrangement dédaigner les apports (limités, mais réels) de la Mission parlementaire d’information de 1998.
En guise de « révision", on découvre donc une étonnante passion révisionniste, qui participe au flot actuel de manifestations débridées de mépris à l’égard du passé et du présent des Africains. L’auteur mesure-t-il à quel point il meurtrit les rescapés du génocide et leurs proches, déjà tenaillés par la culpabilité d’avoir survécu ?
Mais se préoccupe-t-il du sort des Rwandais, Hutus comme Tutsis, et de leur avenir ? Venu s’ajouter à la vague des « experts » improvisés sur ce terrain, connaît-il ce peuple par-delà le théâtre d’ombres qu’il met en scène ?
Si l’on veut aider le Rwanda à sortir de l’ambiance obsidionale et policière que chacun observe, si l’on veut aider ses élites, à l’intérieur comme à l’extérieur, à se défaire de leurs obsessions manichéennes, ne faut-il pas d’abord isoler le virus raciste qui piège ce pays depuis des décennies ! Les concepteurs du génocide ont cherché à en faire triompher la logique en mobilisant massivement les uns dans un « travail » d’extermination des autres. Faut-il, en Europe, leur donner raison ? Et dans quels buts obscurs ?
Le génocide des Arméniens ne se négocie pas avec les intégristes turcs [5] Celui des Tutsis au Rwanda ne se négocie pas avec des nostalgiques ou des attardés du « Hutu power », qu’ils soient noirs ou blancs... Ce livre de Pierre Péan cherche un effet de scandale, il finit par être accablant pour ceux qu’il prétend défendre.
Rwanda, l’enquête inachevée (Par Colette Braeckman) [6]
Autant être clair : le génocide des Tutsis au Rwanda, d’avril à juillet 1994, n’est pas un sujet de polémique. C’est une réalité, confirmée par d’innombrables témoignages, enquêtes et rapports, par des récits, des accusations, des aveux. Les faits sont précis, concordants, vérifiés : plus de 800 000 Tutsis ont été mis à mort en trois mois, de manière systématique, grâce à des listes, des dénonciations, des chasses à l’homme, avec des armes à feu et des machettes qui avaient été depuis longtemps distribuées à des miliciens formés pour tuer.
Cette histoire, qui voit les Tutsis, minoritaires, être considérés comme des étrangers dans leur propre pays, ne remonte pas à 1994, ni à 1990, lorsque des exilés déclenchent la guerre aux frontières : elle date de 1959, lorsque les Hutus, encouragés par le colonisateur belge, sont poussés à une « révolution » qui, au lieu de les dresser contre leurs maîtres européens, est détournée contre leurs compatriotes tutsis devenus suspects depuis qu’ils ont eu l’audace de revendiquer l’indépendance.
Depuis cette date, à chaque fois que les Tutsis exilés tentent de revenir les armes à la main, à chaque fois qu’à l’intérieur du pays ils s’efforcent de regagner du terrain sur le plan social ou politique, la réponse du pouvoir hutu est identique : des civils sont massacrés. Durant des décennies, c’est au nom d’une légitimité fondée sur le concept de « majorité ethnique » que les Belges puis les Français ont appuyé les régimes rwandais successifs.
Lorsque, en 1990, le Front patriotique rwandais (FPR) lance une offensive au départ de l’Ouganda, les Belges s’effacent devant une France qui ne ménage pas son soutien politique et militaire au pouvoir de Juvénal Habyarimana. Sans rien ignorer de la dérive génocidaire inscrite au coeur du régime hutu. Deux ans plus tard, directeur des affaires africaines, Paul Dijoud va jusqu’à mettre en garde Paul Kagamé (chef tutsi du FPR et actuel président rwandais) et les siens, les prévenant du risque qu’ils font courir à leurs familles.
Consciente des dangers, la diplomatie française prône la négociation, le partage du pouvoir. Mais la coopération militaire, elle, s’engage sans cesse plus avant : elle arme et entraîne soldats et gendarmes, elle dresse les plans des batailles et barre au FPR la route de Kigali. Des soldats français participent aux manoeuvres et on les retrouve même aux points de contrôle, triant les citoyens rwandais en fonction de leur ethnie, inscrite sur les documents d’identité.
Lorsque, en décembre 1993, le contingent français se retire, cédant la place aux 500 casques bleus censés faire appliquer les accords de paix d’Arusha, il laisse au Rwanda des « coopérants militaires » en civil (25 officiellement et sans doute le double) dont on ignore à quoi ils s’occupent aux côtés de leurs alliés hutus. Malgré l’embargo, les livraisons d’armes se poursuivent, non seulement jusqu’à la veille du génocide, mais bien après qu’il a commencé : des observateurs onusiens relèvent que les avions de l’opération Amaryllis, venus pour évacuer les expatriés, déposent des caisses d’armes sur le tarmac de l’aéroport. Même lorsque ses alliés hutus se lancent dans le massacre systématique des Tutsis et que les corps s’amoncellent, enlevés dans les rues de Kigali par les bennes de la voirie, la coopération militaire française ne désavoue pas ses alliés : en mai encore, six semaines après le début du génocide, le général Huchon promet à un émissaire rwandais, le colonel Ephrem Rwabalinda, de lui livrer non seulement des munitions, mais des postes sécurisés, afin d’assurer les communications directes entre l’état-major français et ses alliés, dont les troupes passent plus de temps à massacrer et à piller qu’à se battre.
Rappeler tout cela, ce n’est pas adopter une position antifrançaise : c’est aligner des faits réels, observés sur le terrain, c’est s’interroger sur la pertinence et les raisons d’un tel soutien. Ces questions n’occultent en rien le fait qu’en face, la guerre menée par le FPR fut impitoyable, qu’elle charria des crimes et des massacres dont l’ampleur ne se révéla qu’au fil du temps.
Aujourd’hui encore, Pierre Péan (dans son livre Noires fureurs, blancs menteurs) [7] tente de « retourner l’image » de la tragédie rwandaise en occultant la spécificité du génocide - cette entreprise d’extermination dont les Tutsis ont été victimes - et en soulignant les crimes de guerre commis par le FPR à l’encontre des Hutus.
Occultant le soutien militaire apporté par la France aux militaires et miliciens auteurs du génocide, accompagnés jusque dans les camps du Kivu où ils représentèrent un élément de déstabilisation durable pour toute la région, il met l’accent sur les aspects humanitaires de l’opération « Turquoise ». Sans relever que, si le premier but de cette opération avait été de secourir des civils, il aurait peut-être mieux valu amener en Afrique des camions et des ambulances plutôt que des Mirage et des hélicoptères de combat, des infirmiers plutôt que des fusiliers marins et des commandos...
Tout à son entreprise de réhabilitation, M. Péan, qui a cherché la vérité dans les tiroirs de l’Elysée au lieu de se rendre sur le terrain, ne craint pas de se mettre en porte-à-faux avec la France d’aujourd’hui ; dans son ambassade à Kigali, une plaque rappelle désormais les employés tutsis abandonnés en 1994.
Il faut évidemment parler de l’attentat : le tir de missiles qui a abattu l’avion ramenant de Dar es-Salaam le président Habyarimana et son homologue du Burundi fut l’élément qui déclencha un génocide depuis longtemps préparé. Le véritable scandale est que, onze ans après l’assassinat de deux chefs d’Etat en exercice, aucune enquête internationale digne de foi n’ait encore été diligentée. Pierre Péan, lui, se fonde sur l’enquête du juge Bruguière - un magistrat dont lui-même dénonçait en 2001 le « côté barbouze » et les « méthodes expéditives » - pour dénoncer la responsabilité du FPR.
Il est vrai qu’au cours des années, le silence persistant de Kigali, le refus de communiquer tout élément d’information au sujet de l’attentat ont donné à cette hypothèse-là plus de poids qu’elle n’en avait en 1994. Mais il n’empêche que d’autres témoignages, qui avaient amené à une lecture des faits différente, n’ont jamais été pris en compte...
Multipliant les attaques personnelles recopiées au départ de fiches de renseignement, la méthode de Péan insulte les victimes et salit une France mitterrandienne que l’auteur croit avoir défendue, mais qu’il a réussi à amalgamer avec les tenants du pouvoir génocidaire.