D’un côté un billet d’humeur qui prend pour cible une pub mettant en scène une « grosse ». Enfin, regardez le clip, tout est relatif. Le femme en question est plutôt mignonne, en train de danser, bref apparemment pas mal dans ses baskets. Mais pour la journaliste, c’est insupportable : « Bien que corsetées, contenues par tous les moyens textiles modernes, ses chairs flottent et le résultat me révulse ».
Plus grave, cette « répulsion » se transforme en jugement politique du plus curieux tonneau : derrière ce clip se cacherait une nouvelle tyrannie, celle des rondes, qui ont littéralement mis le monde à l’envers puisqu’elles ont réussi à normaliser leur déviance (un excès de nourriture, rappelle, implacable, la journaliste) et qu’elles ont, inversement, imposé l’idée plus que saugrenue selon laquelle une femme mince, c’est-à-dire « normale » (sic) serait une anorexique ! « Comme si faire attention à sa ligne était une maladie ! ».
Enfin, les rondes, ou les grosses, comme vous voulez, seraient coupables également d’avoir imposé cette autre idée, tout aussi saugrenue : les rondes plairaient davantage aux hommes que « ces brindilles qui les narguent ».
Bref : les normes de beauté qui condamnent les femmes à des régimes à répétition en même temps qu’à la haine de leur corps, tout cela ne serait rien face à ce nouveau « politiquement correct » (qui nous rappelle le nauséabond « racisme anti-blanc » [1]) dont seraient victimes… les femmes « normales, donc minces » ! Et nous voilà rendues, en définitive à l’éternel combat des femmes qui s’entretuent pour plaire à l’Homme, centre de gravité invisible de l’article.
C’est pourquoi, à la lecture de son titre, un article de Rue 89 avait de quoi nous intéresser. En plus, ce n’est pas tous les jours qu’on voit l’expression « sexisme ordinaire » s’étaler en gros dans les médias…
Malheur ! L’article de Rue 89 nous impose ce triste constat : le sexisme ne fait les gros titres que quand c’est… un homme qui en est victime ! Car tel est bien le sujet de l’article : le harcèlement infligé à François Holland par des journalistes qui s’obstinent à l’interroger sur les kilos qu’il a perdus. Un harcèlement bien réel au demeurant : le lamentable acharnement du très droitier Pujadas qui demande au candidat de s’expliquer moralement et politiquement sur sa perte de poids – alors qu’il na jamais adressé le moindre début de questionnement critique lorsque le président Sarkozy s’est mis en scène en excluant du champ de la caméra les personnes de trop grande taille, ce qui pourtant relevait de la manipulation et pouvait être mis en question politiquement, beaucoup plus qu’une perte de poids…
Mais tout de même ! Même si les gros aussi sont stigmatisés, n’est-il pas curieux qu’un des rares articles consacré à l’impératif de minceur porte sur un mec ? Anticipant peut-être un petit malaise, la journaliste nous livre la clef : « Et si le candidat socialiste avait été une femme ? Il n’est pas inutile de relever le sexisme, même quand c’est un homme qui en est la victime. ».
Après la tyrannie des grosses, le sexisme anti-mec : il fallait oser…