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Le fantôme de Flora Tristan (Chapitre 16)

Le Polar de l’été

par Abe Zauber
13 août 2008

« On avait beaucoup parlé, en 2003, du lycée Flora-Tristan de Villiers-sous-Bois. L’affaire Fatima, cette jeune fille qui refusait d’enlever son voile islamique, avait relancé la polémique qui avait abouti à une loi de prohibition. Plusieurs des protagonistes de cette histoire viennent, véritable série noire, de trouver la mort. Maurice Mikoyan, ancien professeur du lycée, est retrouvé assassiné – et sa femme, soupçonnée du meurtre, crie son innocence depuis la maison d’arrêt. Un autre ancien professeur, Jacques-Alain Grosjonc, connu pour son engagement dans l’extrême gauche, était mort accidentellement deux jours plus tôt. Puis c’est l’ancien proviseur du lycée, Marcel Le Bihan, qui est décédé, dans un accident tellement semblable qu’il est difficile de ne pas être troublé par la coïncidence. Et hier, c’est le CPE du lycée, Thierry Bouquetin, qui a trouvé la mort à la suite d’une agression, à quelques pas du lycée. Rien ne permet en l’état actuel de dire si ces morts ont quelque chose à voir les unes avec les autres, et si cette série de décès a quoi que ce soit à voir avec l’affaire Fatima. Aucune enquête policière ne semble être en cours sur l’ensemble de l’affaire. Mais n’est-ce pas à la presse d’attirer l’attention de la Justice ? » (Camille Leclère, Le Parisien).

Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4

Chapitre 5 Chapitre 6 Chapitre 7 Chapitre 8

Chapitre 9 Chapitre 10 Chapitre 11 Chapitre 12

Chapitre 13 Chapitre 14 Chapitre 15

Chapitre 16

Michel Aaronovitch était un grand gaillard, un peu ours, un peu gauche, à la langue sans doute trop lourde pour sa bouche, ce qui le conduisait à postillonner plus que de raison à chaque mot qu’il prononçait. Et il en prononçait beaucoup. Peu soigné, vaguement sanguin, il aurait vendu sa mère pour un bon mot, mais manquait un peu d’humour – qu’il remplaçait par un genre d’emphase phraseuse, pimentée de suffisance et de morgue. Il s’aimait bien.

Ted avait glané à son sujet diverses informations, qu’il avait eu du mal à décrypter, tant tout cela était, de son point de vue, étrangement hexagonal. Plus il avançait dans son enquête, d’ailleurs, plus la politique française lui était énigmatique. Avant de fonder son association « Famille Républicaine », Aaronovitch avait eu un parcours plutôt chaotique. Anarcho-soixante-huitard à vingt ans, il était, à vingt cinq, entré au parti socialiste, que, faute d’y faire carrière, il avait quitté en même temps que son gourou d’alors, Jean-Pierre Chevènement, dont il aimait le goût de l’ordre et ce qu’il prenait pour de l’éloquence. Franc-Maçon et homme d’intrigue, il avait un temps espéré devenir l’un des chefs du Grand-Orient. Mais les places y étaient chères. Longtemps, il avait attendu son tour de jouer le rôle du grand prêtre dans les rites de la secte. Puis, il avait renoncé. Il ne pouvait se résigner à n’être jamais le premier que dans l’ordre alphabétique. Fonder son propre mouvement était le moyen sûr d’être le chef de quelque chose : il n’avait pas balancé longtemps, une fois que la lumière était tombée sur lui pour lui faire toucher du doigt cette évidence.

Avec ce genre de mec, le mieux était de se faire passer pour un journaliste. C’est donc comme correspondant improvisé du New York Herald Tribune que Ted Berger avait prit rendez-vous.

Dans le concert des déclarations plus ou moins fracassantes, des hypothèses plus ou moins fantaisistes qui avaient suivi l’annonce de la mort de Véronique Landais, Aaronovitch était celui qui avait été le plus bruyant et le plus inventif. Son analyse de l’événement tenait en un mot : le Djihad.

La coqueluche locale du parti socialiste s’était jetée au petit matin du balcon de son studio, au huitième étage d’une tour de la cité Spoutnik. La thèse du suicide s’était imposée aux enquêteurs. Elle était seule au moment des faits, et le verrou de son studio était fermé. On avait constaté de fortes doses d’alcool dans son sang, et une bouteille de whisky vide avait été retrouvée sur la moquette. On ne voyait, cela dit, pas d’explication rationnelle à ce suicide ; et on en cherchait pourtant, comme si la rationalité était le propre des comportements suicidaires. Ambitieuse autant qu’enjouée, elle n’avait jamais manifesté le moindre signe de dépression. Tout dans la vie lui souriait. Elle avait, quelques heures avant sa mort, participé à une réunion publique où tout s’était parfaitement passé ; elle avait été brillante et très applaudie. Malgré des divergences politiques accessoires, elle s’entendait parfaitement bien avec ses parents, un couple de médecins dont elle était la fille unique, et qui exerçaient depuis plus de vingt ans dans la cité. Quoi qu’il en soit, même si personne n’en comprenait la cause, le suicide était patent.

Certains firent courir le bruit qu’à l’origine de ce suicide, il y aurait eu une aventure entre Véronique Landais et Charles Forest. L’avocate de ce dernier, Caroline Papazian, fit savoir que quiconque colporterait cette rumeur dépourvue de fondement se retrouverait devant les tribunaux. La rumeur n’en était pas moins insistante : la liaison était, de fait, de notoriété publique.

Camille Leclère avait essayé de convaincre son rédacteur en chef que ce suicide étrange devait être mis en relation avec la série noire évoquée dans son premier article, mais il s’était fait durement rabrouer. On avait eu, lui avait-on dit, assez d’ennuis comme ça, et pour y revenir, il aurait fallu plus qu’une intuition : du solide. Et du solide, on n’en avait pas.

Gérard Landais, de son côté, se répandait en déclarations plus ou moins cohérentes, laissant entendre que c’était lui qui, à travers sa fille, était visé. Président local du Mrap, il était, disait-il, menacé depuis quelque temps à cause du soutien qu’il apportait au combat des sans-papiers du foyer de Vladivostok. Il affirmait sur le ton du grand mystère que de gros intérêts étaient en jeu et que la vérité se ferait bientôt jour. Camille se demandait quant à lui si Landais n’était pas tout simplement sur la piste du même gibier que lui.

Michel Aaronovitch, lui, ne s’embarrassait pas de détails. Reprenant à son compte la théorie de l’article, il y ajoutait son explication. Il y avait bien eu cinq meurtres, même si la question très accessoire de savoir comment ils avaient été commis demeurait sans réponse. Quant à savoir par qui, les choses étaient extrêmement simples : on avait affaire à un complot islamiste.

Chacun sait, disait-il, même si personne ne veut le reconnaître, que le Djihad est commencé dans nos quartiers. Que les imams prêchent dans des caves la guerre sainte contre la République, jugée coupable pour sa laïcité. Qu’ils sont décidés à tout pour se venger de ceux qui ont eu le courage d’exiger une loi contre les signes religieux à l’école, garante des traditions de notre nation. Ce sont eux qui ont armé le bras des assassins ! Un sursaut, ajoutait-il, est nécessaire. Combien de temps devront nous tolérer de voir nos quartiers envahis par des barbus en tenue de djihadistes et par des femmes défiant l’autorité par le port ostensible, dans l’espace public, d’un foulard symbole d’une oppression qu’elles veulent imposer à la société toute entière ?

Ces explications semblaient grotesques à Ted, et il se demandait en lui-même pourquoi il avait tenu à rencontrer ce chevalier blanc de la laïcité. Sans doute l’intéressait-il comme peut intéresser une caricature, qui laisse voir de la réalité des traits saillants, mais en leur conférant une dimension telle qu’on sait ne pas pouvoir s’y fier. S’il partageait avec lui l’idée que l’on avait affaire à une série de meurtres, le grand guignol islamesque agité par Aaronovitch lui apparaissait être un mélange de propagande politique plus ou moins faisandée et de délire raciste. Mais à côté de cela, le fondateur de « Famille Républicaine » passait pour être un proche de Véronique Landais et de Charles Forest. Et s’il ne semblait pas avoir été personnellement mêlé à l’affaire Fatima, il l’avait suivie d’assez près pour, peut-être, donner au détective quelques renseignements.

Or, même s’il écartait, à chaque fois qu’il s’efforçait d’y réfléchir sereinement, la « piste Fatima », Ted demeurait littéralement fasciné par cette histoire, et les rapides recherches effectuées à son sujet, qui complétaient les récits de Bouquetin, de Clara, et de Camille, l’avaient à plusieurs reprises conduit à tomber sur le nom d’Aaronovitch. Quand celui-ci y était allé de ses explications après la mort de Véronique Landais, le détective s’était donc penché d’un peu plus près sur le personnage. Il avait le sentiment d’être en train de devenir un spécialiste de la tératologie politique française.

C’est dans son cabinet d’architecte – puisque tel était son métier – que l’homme en question reçut le correspondant de la presse yankee.

- Je ne suis pas sûr que les américains mesurent l’ampleur de la question islamiste à l’heure de la mondialisation turbocapitaliste, dit-il d’emblée. Autant vous le dire tout de suite, je ne suis pas favorable à Georges Bush !

- Moi non plus, si cela peut vous mettre à l’aise, fit Ted. Et je ne crois pas que Bush passe pour un supporter de l’islamisme… Mais vous savez que chez nous, c’est G.W. Bush, qui est « républicain », alors il peut y avoir des choses difficiles à comprendre pour mes lecteurs si c’est comme cela que je vous présente.

- Je sais bien. On a chez vous un usage dévoyé du mot « républicain ». Vous ne l’employez pas dans son véritable sens, le sens universaliste, comme nous le faisons ici, en France. Mais je suppose que vous aurez à cœur d’éclairer vos lecteurs sur ce point…

- On fera ce qu’on pourra, soyez en sûr !

- Je vous disais donc que même si Georges Bush dénonce parfois l’islamisme, ce n’est jamais à travers une analyse correcte. Chacun voit que ce qui l’intéresse, ce sont les enjeux pétroliers du Proche-Orient. Et il n’a jamais dénoncé le régime clérical saoudien. Au contraire. En réalité, Bush et Ben Laden mènent la même croisade contre la laïcité, et contre l’émancipation sociale. Ce sont les deux faces d’une même médaille. Ils ont le même modèle de société, qui est le communautarisme à l’anglo-saxonne. Et ici, nous avons assisté à ce que je n’hésite pas à appeler une véritable trahison de la part de la gauche communautariste, les pro-voile et les islamogauchistes. Ils ont laissé le loup entrer dans la bergerie, et voilà le résultat.

- Islamogauchistes ?

- Oui. C’est comme ça que l’on appelle ici la fraction de la gauche, imprégnée de culpabilité coloniale mal digérée, qui joue les idiots utiles des intégristes. Les Destanne, Boghossian, Schweineman… Les complices du fanatisme au nom de la tolérance. Mais comme le notait un de nos grands philosophes, « trop de tolérance tue la tolérance ».

- Oui, chez nous c’est à peu près ce que disait le sénateur McCarthy. C’est ce qui a valu à mon père d’être révoqué de son poste à l’université.

- Vous comparez ce qui n’est pas comparable ! Regardez ces dossiers, là, au pied de mon bureau ! Ce sont les documents que j’ai réunis sur la plupart de ces gens là. Ils sont infiltrés partout…

C’est vraiment McCarthy, avec ses listes de noms, se dit Ted. Heureusement que ce type n’a aucun pouvoir… Il préféra évacuer le sujet, et poursuivit.

- Sans doute. J’aimerais que vous m’expliquiez, pour que je puisse répercuter cette analyse sur mes lecteurs, pourquoi vous soupçonnez la mouvance islamiste d’avoir assassiné ces personnes ?

- Véronique Landais, que je connaissais bien, même si nous n’étions pas toujours d’accord, était une véritable laïque. C’est dire si les islamistes l’avaient dans le collimateur. Elle avait été une animatrice de l’association Ni Putes Ni Soumises à Villiers-sous-Bois… C’est une association de filles des quartiers qui luttent contre le sexisme et le machisme insufflés par les imams intégristes et les petits caïds.

- Et vous pensez que c’était une cause suffisante pour la tuer ?

- Vous êtes bien naïf ! Ou bien vous refusez de voir la vérité en face…

- Et Bouquetin ?

- Vous avez bien vu qu’ils ont arrêté un petit caïd. Si ce n’est pas une preuve qu’il faut y chercher la main des islamistes, qu’est-ce que c’est ?

- Et les autres ? Le Bihan, Grosjonc…

- Pareil. Ils ne leur ont jamais pardonné d’avoir fait échec à leur opération de subversion de l’école républicaine. Vous savez, nous sommes passés à côté d’un grand danger, en 2003. Nous avons eu à faire face à une véritable offensive des intégristes, et ils ont bien failli faire plier la République, et nous imposer le foulard islamique à l’école. Ils avaient introduit l’une des leurs, une fanatique, dans le lycée Flora-Tristan, et c’est grâce au courage et à la détermination de gens comme Marcel Le Bihan – et pourtant, je n’étais pas politiquement de son bord, vous pouvez me croire, mais je reconnais pleinement ses mérites ! – que cette bataille a été gagnée. Je dois dire que la réaction du corps enseignant a été magnifique ! Jacques-Alain Grosjonc aussi a été formidable, même si je n’ai pas compris qu’ensuite, il se prononce contre une loi sur les signes religieux…

- Il avait changé d’avis ?

- Non, pensez-vous… Mais c’est la discipline de parti qui a prévalu. Son organisation politique est gangrenée par les islamogauchistes, qui ont réussi à lui imposer une ligne pro-voile.

- Ah, je ne savais pas…

- Si vous saviez tout, vous n’auriez pas besoin de m’interviewer ! Aujourd’hui, à gauche, on est traité de raciste dès que l’on veut combattre l’islam radical ou les petits caïds de banlieue, dès qu’on dénonce l’excision, ou qu’on parle d’égalité entre hommes et femmes. Croyez-le si vous voulez, mais c’est ainsi. Tenez, lors de la dernière Fête de l’Humanité, la fête organisée chaque année par le parti communiste, on vendait – je vous le donne en mille ! – de la paella hallal !

Mon Dieu, mais qu’est-ce que c’est que ce mec ? se demanda Ted. L’autre continuait en s’esclaffant :

- Remarquez, on aurait dû voir venir le coup, depuis le temps qu’on y vend des merguez… Mais là, avouez que la ligne jaune a été franchie !

Puis il reprit, sur un ton plus sérieux :

- Plus personne ne se soucie de la laïcité. Ils masquent leurs positions anti-laïques en parlant de « laïcité ouverte »… Et pourquoi pas parler de « droits de l’homme ouverts », pendant qu’ils y sont !

Aaronovitch parlait haut et fort, et Ted avait déjà dû reculer à trois reprises son fauteuil depuis le début de l’entretien. Une fois de plus, il essuya de son visage les postillons de son hôte.

- Selon vous, les morts de Thierry Bouquetin et de Maurice Mikoyan s’expliquent de la même façon ?

- Bien sûr. En fait, c’est tout le noyau de ceux qui les ont combattus dans cette histoire. Et n’oubliez pas que l’affaire Fatima, c’était la première bataille dans la guerre qui a abouti, avec la loi de 2004, à leur défaite totale. Symboliquement, elle est donc tout à fait essentielle.

- Mais pourquoi, s’il s’agissait de marquer quelque chose de symbolique, n’y a-t-il aucune revendication ?

- Parce que ce sont des lâches !

Mon Dieu, je ne sais pas ce que je suis venu faire ici, se dit Ted. Ce type est complètement cinglé.

- Et que pensez-vous de l’hypothèse lancée par Gérard Landais, demanda-t-il ?

- Gérard Landais est un ami. Je le connais bien. Mais c’est un naïf. Et le décès de sa fille a dû le rendre fou. Vous savez qu’il est un responsable du Mrap, organisation elle aussi complètement noyautée par les islamogauchistes, depuis qu’ils ont lancé sous la houlette de Alex Destanne et Görek Boghossian une véritable campagne d’entrisme en son sein. Lui, il croit qu’il peut les combattre de l’intérieur, mais c’est parce qu’il n’a pas encore compris l’étendue du désastre. Il faut lui reconnaître qu’il a toujours refusé – et c’est tout à son honneur – de mêler sa voix à ceux qui prétendent interdire la critique des religions et le droit au blasphème au nom de ce qu’ils appellent « la lutte contre l’islamophobie ». Mais d’un autre côté, il continue à s’époumoner pour des clandestins qui refusent la loi républicaine, alors que chacun sait que ce sont les réseaux islamistes qui organisent l’immigration illégale, au mépris des lois de la République…

- Ah ? Je ne savais pas ça…

- Bien sûr, vous ne connaissez pas nos réalités françaises. Jetez un coup d’œil autour des foyers africains, par exemple, vous verrez un peu partout des vendeurs à la sauvette de corans, de chapelets islamistes, etc. On l’oublie souvent, mais beaucoup de mosquées et autres structures communautaristes ou islamistes sont tenues par des clandestins et des illégaux d’Afrique noire ! Mais ça, Landais, il ne le voit pas. Il ne veut pas le voir. Il lui reste une part d’angélisme, comme à beaucoup.

Ted essuya à nouveau son visage, et recula son siège. Aaronovitch poursuivait :

- Ce sont aussi les réseaux islamistes qui organisent le travail clandestin de leurs ouailles, et contribuent ainsi au démantèlement du droit du travail dans notre pays. On n’insistera jamais assez sur la parfaite adéquation de l’intégrisme et du communautarisme avec le stade turbocapitaliste de la mondialisation libérale.

Mon Dieu… se dit Ted. Puis, à voix haute :

- Mais, une chose m’échappe, et risque d’échapper aussi à mes lecteurs, c’est pour ça que je me permets de vous poser la question de manière aussi directe : qu’il y ait des musulmans en France, c’est si grave ?

- Le problème, Monsieur Berger, c’est que l’Islam n’est pas soluble dans la République. Nous avons, en France, une conception du vivre ensemble très raffinée, qui est le résultat de siècles et de siècles d’histoire et de luttes, et qui repose sur la laïcité, c’est à dire sur la séparation radicale de l’espace public et de l’espace privé. Seul ce qui nous unit comme français, comme citoyens, a sa place dans l’espace public. Celui-ci doit demeurer neutre. Ce qui nous divise doit en être exclu.

« Neutre ! » se dit Ted, en reculant une fois de plus son siège.

- Mais, demanda-t-il, même si l’on doit vous suivre, pourquoi considérer que l’islam diviserait les français.

- C’est ainsi. Notre manière de vivre, à nous les français, ce n’est pas de mettre une bâche sur la tête des femmes pour qu’elles s’en couvrent le corps entier !

- Je vois. « Comment peut-on être Persan ? », c’est un peu ça…

- Si vous voulez.

- Et, pour en revenir à notre affaire : est-ce que vous pensez que cette série de meurtres va se poursuivre ?

- C’est évident. Je peux même vous dire une chose : leur prochaine cible est sans doute Nora Slimani, qui avait mené cette bataille contre le communautarisme main dans la main avec Véronique Landais. Il faut regarder la vérité en face : ils ont déclaré la Guerre Sainte, et tant qu’ils n’auront pas imposé en France un régime islamique à l’iranienne, ils n’abandonneront pas. Mais soyez tranquille : il y a ici de vrais républicains qui sauront s’y opposer !

- Vous même, vous craignez pour votre vie ?

- Je serais fou de ne rien craindre. Mais je vous rassure tout de suite, je prends toutes les précautions utiles…

- J’aimerais bien, pour compléter mon reportage, rencontrer certains de ces islamistes… Vous croyez que c’est possible ?

- Possible, sûrement ! Ce n’est pas ça qui manque… Mais je me garderais bien de vous le conseiller.

- Pourquoi donc ?

- Vous savez, les barbus sont les maîtres du double langage. Mentir est pour eux plus qu’une seconde nature : c’est une obligation rituelle. Ils appellent ça la Takia. Malik Aabad, par exemple, qui est le typique représentant de l’extrême droite islamiste, est dans ce genre un champion toutes catégories. Mais de toutes façons, s’il sait que vous m’avez parlé, je doute fort qu’il accepte de vous recevoir ! Il aura trop peur que je vous aie affranchi !

P.-S.

Le fantôme de Flora Tristan paraîtra en 24 chapitres pendant tout l’été, du mardi au vendredi.

Prochain épisode : Chapitre 17, en ligne le jeudi 14 août.