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Le syndrome du patron de gauche

Un livre à lire d’urgence dans le camp progressiste

par Sebastien Fontenelle
9 décembre 2022

Un jour, un livre : pendant toute la durée du mois de décembre, nous publions chaque jour la présentation et / ou un extrait d’un livre paru cette année, à offrir, s’offrir ou se faire offrir à l’occasion des fêtes de la Saint Nicolas, de Hanoukkah, de Noël, de la Saint Sylvestre, du Noël orthodoxe, du Noël arménien ou à toute autre occasion. Le livre du jour, dont Sébastien Fontenelle nous donne, dans les lignes qui suivent, une brève – mais éloquente et édifiante – présentation, s’intitule Le Syndrome du patron de gauche. C’est un livre important – ne serait-ce que parce qu’il s’attaque enfin à un sujet pour le moins sous-traité.

À un angle mort du camp progressiste, où l’on oublie parfois que dans « patron de gauche », il y a aussi «  patron » - avec tout ce que cela peut induire de comportements problématiques et de souffrance(s) au travail.

Arthur Brault-Moreau, l’auteur de ce « manuel d’anti-management » dont on voudrait citer chaque ligne ou presque, sait de quoi il parle : il a été embauché, à la fin de ses études, par une élue de gauche. Mais au fil du temps, écrit-il : « L’enthousiasme des premiers jours a laissé place (...) au constat quotidien que la réalité de mon travail était très éloignée des valeurs défendues par mon employeuse. »

Arthur Brault-Moreau propose un amusant questionnaire, qui permet à tou·te un·e chacun·e de vérifier si son employeur ou son employeuse souffre du syndrome du patron de gauche.

Par exemple, si, «  tout en maintenant » d’irréprochables « référentiels révolutionnaires », un PDG « n’hésite pas à utiliser son pouvoir d’employeur pour (…) sanctionner  » des salarié·es, même si « ces pratiques ne sont pas légales » (mais « peu importe, parce que c’est lui le chef  ») ? Si «  on se sent constamment tiraillé entre les discours du PDG et la réalité du travail » ? Si « on a le sentiment qu’il faut doublement lutter, sur les conditions de travail et face au discours affiché » ?

Alors le doute n’est plus permis : le PDG en question est « un beau parleur-pipeauteur  ». C’est à dire qu’il « aime faire de belles phrases », mais que «  la beauté du verbe sonne faux tant ses pratiques y sont radicalement opposées  ».

En de tels cas, «  toute la difficulté  », souligne l’auteur de ce dense et vif essai, « est de parvenir à faire un pas de côté, d’échapper au son du pipeau et de ramener le verbe à la réalité des conditions de travail  ».

Arthur Brault-Moreau développe une passionnante réflexion partant du constat que « l’analyse des conditions dans lesquelles vivent leurs salarié·e » n’est malheureusement «  pas une priorité pour les organisations de gauche  », et nous invitant collectivement à ne plus « bouder  » cette question.

Dans sa conclusion, il préconise une recette simple, mais trop souvent oubliée au sein des structures professionnelles de gauche : « L’action syndicale. »

Car, rappelle-t-il, « la forme d’action collective qu’est le syndicat apporte aussi des réponses aux problèmes posés par le management de gauche  ». Ainsi : «  La présence d’un syndicat dans une organisation permet de rappeler l’existence d’un rapport salarial et d’une distinction entre l’employeur et les salariés, et (...) rappelle que les enjeux internes, la gestion des membres et des salarié·es sont (...) un critère qui renseigne beaucoup sur l’engagement  » effectif d’une environnement professionnel réputé de gauche.

Puis de conclure : « Syndiquons-nous !  »

Chiche ?

P.-S.

Le Syndrome du patron de gauche de Arthur Brault-Moreau est paru aux éditions Hors d’atteinte.
Cet article est paru initialement dans le journal Politis.