Depuis 1998, Pinar Selek est soumise à un procès kafkaïen mais elle résiste.
En 2014 elle a été acquittée pour la quatrième fois mais le procureur a fait appel une fois de plus.
Depuis, l’affaire Pinar Selek était renvoyée dans les méandres de la justice. Le 25 janvier 2017, après une attente infinie, le procureur de la Cour de Cassation a donné son avis : il demande une condamnation à perpétuité.
Cour d’assise, Cour pénale, Cour de cassation, la procédure qui dure depuis 19 ans est si complexe qu’elle fait tourner la tête.
L’enjeu pour Pinar Selek, ses proches et ses soutiens est de garder l’équilibre malgré ce procès infâme.
Lorsque l’on se penche sur la chronologie de ce procès, on comprend l’ampleur de l’acharnement. Et pour ne pas se laisser ensevelir on construit des stratégies de résistance. Et pour cela nous devons être nombreuses et nombreux.
Pinar Selek est le symbole d’une Turquie résistante malgré la répression, qui doit pouvoir continuer à penser, à créer, à s’organiser, à lutter.
Tous les liens que Pinar Selek a tissé ici et ailleurs, sont une force collective, cette force peut agir maintenant :empêcher sa condamnation, faire connaître ses écrits, ses idées, résister à ses côtés, ouvrir des portes et des chemins qui la protègeront et lui donneront l’énergie de continuer. Il y a beaucoup à faire, chacun-e trouvera sa façon de faire.
Pinar Selek n’est pas seule !
Des collectifs de solidarité existent à Strasbourg, Lyon, Paris, Nice et voici le dernier communiqué du collectif de solidarité en Turquie puis une chronologie résumant les grandes dates du procès.
La torture, incessante
Nous sommes vraiment désolés de vous annoncer que, 19 ans après le début du procès de Pınar Selek, le harcèlement judiciaire continue, dans la plus pure illégalité. Ce procès est une torture, nous ne pouvons le qualifier autrement. Pinar Selek a été acquittée à quatre reprises, et en ce mois de janvier 2017, le Procureur général de la Cour suprême réclame à nouveau l’annulation de la quatrième décision d’acquittement.
Inutile de dire qu’il n’y a aucune trace de nouvelles preuves, aucun nouvel élément dans cette affaire. Les conspirations au plus haut niveau de l’Etat ont repris, et c’est une honte puisque au cours de ces années elles se sont avérées totalement infondées.
Vous vous en souvenez peut-être, le 19 décembre 2014 la 15ème chambre du Tribunal pénal supérieur d’Istanbul a, pour la quatrième fois, acquitté Pınar Selek de tous les chefs d’accusation portés contre elle. Quelques jours après seulement, le procureur a interjeté appel de ce quatrième acquittement et le dossier a été de nouveau envoyé à la Cour suprême pour qu’elle l’examine.
Aujourd’hui, le Procureur général de la Cour suprême demande à son tour l’annulation de l’acquittement et il revient à la 16ème Chambre criminelle de la Cour suprême de se prononcer sur cet appel.
Cette nouvelle étape montre avec quelle détermination les structures qui agissent dans l’ombre au sein de l’appareil d’État prennent Pınar Selek pour cible : le but est clairement de salir la réputation de l’antimilitariste convaincue, de la sociologue, de la féministe et de l’écrivain. Au fil du temps ce procès politique s’est transformé en instrument de vengeance contre les opposant·es qui osent critiquer le statu quo fondé sur la violence et la répression.
Nous sommes très inquiets de la tournure dangereuse que prend ce procès, en particulier compte tenu du climat politique extrêmement tendu qui s’instaure en Turquie.
Votre soutien, votre intérêt pour le déroulement de cette affaire est primordial et nous vous en remercions. Faites part autant que possible de vos interrogations et de vos craintes aux autorités turques. Ce soi-disant procès, il faut le redire, est source d’un véritable traumatisme psychologique pour Pınar Selek, pour les membres de sa famille, qui sont aussi ses avocats, pour ses amis et ses partisans, tant en Turquie que partout dans le monde.
Toutes vos contributions peuvent nous aider à obtenir la justice à laquelle nous aspirons depuis longtemps. Nous ne voulons que la justice et nous nous nous battons pour qu’elle soit rendue, maintenant plus que jamais.
Solidairement,
Yasemin Öz
(avocate, porte-parole internationale du Comité Justice pour Pinar Selek)
Dix-neuf ans de persécution et de résistances
11 Juillet 1998 : Arrestation suite à une recherche sur des militants kurdes. Torture.
20 Août 1998 : Pinar Selek apprend en prison qu’elle est accusée d’un attentat (on saura plus tard que c’est une explosion accidentelle qui a été maquillée en attentat dans le but de l’accuser).
22 décembre 2000 : Libération (faute de preuves, mais le procès continue).
8 juin 2006 : Premier Acquittement (toujours faute de preuves). Mais le procureur fait appel.
17 Avril 2007 : La cour de Cassation va dans le sens du procureur et casse l’acquittement.
23 Mai 2008 : Deuxième Acquittement (aucun fondement dans les charges retenues contre elle). Mais le procureur fait appel.
2009 : La Cour de Cassation va dans le sens du procureur, casse l’acquittement et décide de condamner Pinar Selek. L’affaire est renvoyée devant une nouvelle Cour d’Assises.
9 Février 2011 : Troisième Acquittement. (La Cour ne retient toujours aucune charge contre Pinar Selek. Dès le lendemain, le procureur fait appel.
22 Novembre 2012 : La Cour annule son propre acquittement (du jamais vu dans l’Histoire mondiale du droit).
24 Janvier 2013 : La Cour condamne Pinar Selek à la prison à perpétuité.
11 Juin 2014 : Annulation de la condamnation (obtenue suite à un appel des avocats dénonçant les illégalités de cette procédure).
19 Décembre 2014 : Quatrième acquittement. Mais le procureur fait appel.
Mercredi 25 Janvier 2017 : Le procureur de la Cour de Cassation publie son réquisitoire : il demande une condamnation à perpétuité.
Jeudi 26 Janvier 2017 : Pinar Selek répond : "ils n’auront pas mon sourire et mon énergie !"
Vendredi 27 janvier 2017 : Nous résistons !