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Retraites : 12 idées reçues à combattre

06 – On conserve un système par répartition

par Anaïs Henneguelle
24 janvier 2020

En soutien à la grève, et pour étendre les prochaines mobilisations, le Collectif Les mots sont importants republie une réfutation en douze points de la propagande gouvernementale sur la "réforme" des retraites. Ce guide d’auto-défense a pour vocation de fournir des arguments à tous ceux et toutes celles qui s’opposent à la réforme des retraites mais sont parfois démunis face aux éléments de langage (parfois faux, la plupart du temps incomplets ou simplistes) qu’on leur oppose. Comment répondre aux éléments de langage du gouvernement ? Que rétorquer à son ami, salarié du privé, qui prétend que « ça fait les pieds aux fonctionnaires et aux cheminots » ? Quels chiffres simples mais efficaces mettre en avant pour exprimer sa colère ou son inquiétude ? En bref, comment (se) mobiliser contre la réforme des retraites ?

5ème idée reçue : Il faut limiter la part des retraites dans le PIB à 14 %.

La baisse future des pensions va favoriser les retraites par capitalisation

D’accord, on conserve effectivement un système par répartition. Pour rappel, un système par répartition correspond à une solidarité intergénérationnelle : la génération de travailleurs actuelle cotise pour financer les retraites de la génération de retraités actuelle.

À l’inverse, un système par capitalisation correspond à une logique individuelle : chacun cotise actuellement pour se garantir sa propre retraite dans le futur (par l’intermédiaire notamment des fonds de pension).

Mais cette réforme fragilise en grande partie le système de répartition. En effet, avec la baisse future des pensions, il y a fort à parier que celles et ceux qui le peuvent vont se tourner vers des mécanismes complémentaires de retraite en épargnant au fur et à mesure de leur carrière. L’incitation à la capitalisation via la baisse des pensions est claire !

La solidarité intergénérationnelle nécessaire à la répartition est mise à mal

Un système par répartition repose sur une forte solidarité entre les générations.

Or, la réforme actuelle brise la solidarité intergénérationnelle en distinguant trois groupes, ceux nés avant 1975 (pas affectés par le nouveau système, mais qui le seront par l’introduction rapide d’une décote pour un départ à 62 ans), ceux nés entre 1975 et 2004 (affectés par le nouveau système pour la partie de leur carrière qui aura lieu après 2025) et ceux nés après 2004 (entièrement affectés par le nou-veau système).

On monte ainsi les catégories de Français les uns contre les autres [1].

La réforme annoncée intervient dans un contexte particulier, celui de l’arrivée en France des fonds de pension

L’objectif inavoué de la réforme est clair : le passage progressif à un régime par capitalisation, en diminuant progressivement les pensions, ce qui incite les Français à y avoir recours pour compenser [2].

Comment en effet ne pas le penser lorsqu’on lit par exemple que « plusieurs géants américains se positionnent sur les opportunités offertes par la réforme de l’épargne retraite » [3] (dont la très puissante société de « gestion d’actifs » BlackRock) ?

Ou bien que « le gouvernement introduit par la loi PACTE des fonds de pension à la française » [4] ?

Comment ne pas le penser non plus lorsqu’on découvre les (nombreux) liens de l’ex-Haut Commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, avec le monde de l’assurance [5] ?

7ème idée reçue : Il faut en finir avec les régimes spéciaux.

P.-S.

Ce texte a été rédigé par Anaïs Henneguelle, maîtresse de conférences en économie à l’Université de Rennes 2, membre du collectif d’animation des Économistes Atterrés. Nous le reproduisions avec l’amicale autorisation de l’auteure. La liste des arguments décodés ici s’inspire de l’allocution d’Édouard Philippe du 11 décembre dernier.

Notes

[1Comme l’explique Dominique Méda dans son intervention au « Téléphone sonne » de France Inter du 11 décembre.

[2Voir à ce sujet le très clair article de Martine Orange dans Mediapart.

[3Comme on peut le lire dans Les Échos dès septembre 2019.

[4Voir cet article d’Europe 1 d’octobre 2019.

[5Par exemple .