6ème idée reçue : On conserve un système par répartition.
Arguments similaires/liés souvent entendus :
— « Les régimes spéciaux bénéficient à des privilégiés »
— « Les régimes spéciaux vivent aux dépens du régime général »
— « Le système des 42 régimes est complètement illisible »
Les régimes spéciaux constituent un alibi pour réformer l’ensemble du système des retraites par le bas
Mettre l’accent sur la fin des régimes spéciaux permet au gouvernement d’avoir des éléments de langage pour justifier sa réforme : il s’agirait avant tout de « rétablir l’égalité » entre tous les régimes. Les régimes spéciaux, en ce sens, jouent le rôle d’un écran de fumée qui permettent de focaliser l’attention des Français tout en modifiant le système en profondeur à beaucoup d’autres en- droits.
On entend d’ailleurs souvent dire que les régimes spéciaux sont des « privilégiés » et que « les [remplacez par n’importe quel nom de profession pénible] travaillent aussi d’arrache-pied, et sans tous ces avantages ! ». Oui. Cette logique revient à appliquer un principe égalitariste strict : puisque certains n’ont pas cette chance, personne ne doit l’avoir [1].
Les régimes spéciaux sont très minoritaires
Le gouvernement parle souvent des « 42 régimes » du système actuel. Comme on sait finalement peu de choses sur notre système de retraite, on a tendance à penser qu’il y a un régime général et 41 régimes spéciaux...
Or, ce n’est pas du tout le cas.
Il y a en fait cinq blocs de régimes de sécurité sociale : le régime général (qui couvre 80 % des travailleurs et qui est couronné d’un régime complémentaire, l’AGIRC-ARCCO), les régimes dits assimilés (qui fonctionnent comment le régime général, avec leurs propres régimes complémentaires, comme le régime des salariés agricoles, des exploitants agricoles, des indépendants...), le régime de la fonction publique, les régimes autonomes des professions libérales (médecins,avocats, pharmaciens...), et enfin le bloc des régimes spéciaux. Ces régimes sont « spéciaux » car ils fonctionnent sur la base d’une solidarité restreinte à une profession (comme pour les marins, les militaires, les avocats) ou à une entreprise (comme pour la SNCF ou la RATP). Ils sont généralement antérieurs à la création de la sécurité sociale [2]. Chaque régime spécial est soumis à ses règles propres de cotisation et de calcul des pensions.
Les régimes spéciaux concernaient environ 1 mil- lion de bénéficiaires sur les 17,2 millions de retraités que comptait la France au 1er décembre 2017 : ils représentent donc environ 6 % des retraités [3]. Ils n’ont plus que 370 000 cotisants, que l’on bouleverse tout le système de retraites soit 1,5% des cotisants. Cela représente donc une actuel... très petite minorité, qui ne justifie pas à elle seule que l’on bouleverse tout le système de retraites actuel.
Beaucoup de régimes spéciaux vont disparaître d’eux-mêmes
On comptait en 1945 plus d’une centaine de régimes spéciaux. Actuellement on en compte une quinzaine seulement. En effet, beaucoup de régimes spéciaux ont vocation à disparaître par eux-mêmes, car la profession qu’ils représentent n’existe plus. C’est le cas par exemple des personnels de l’ex-SEITA (régie publique des tabacs), qui comptait en 2017 5 cotisants pour 8 482 bénéficiaires. En 2017, la caisse des Chemins de fer de l’Hérault, qui faisait partie jusque là de la liste des régimes spéciaux, a disparu suite à la mort de son dernier bénéficiaire [4].
Les régimes spéciaux de retraite ne sont donc pas si nombreux que ça (entre 10 et 13 selon la façon de les compter [5]) et leur nombre a encore vocation à diminuer à l’avenir.
Les problèmes de financement des régimes spéciaux sont avant tout démographiques
Les régimes spéciaux ont-ils un problème de financement ? La réponse est majoritairement oui... car ils ont avant tout un problème démographique ! Par exemple, le régime spécial de la SNCF compte 144 000 cotisants environ pour 258 000 bénéficiaires, soit presque 1 actif pour 2 retraités...
Néanmoins, inclure tous ces régimes dans un « régime universel » ne règle pas du tout ce problème du déficit de certaines branches, puisque ce denier est structurel (il est démographique) et ne sera pas résolu en rassemblant différemment les travailleurs. Heureusement, d’autres secteurs d’activité comporte un ratio cotisants/bénéficiaires plus favorable, ce qui contribuera à l’équilibre des comptes de l’assurance retraite.
Mais cette branche là spécifiquement (celle des cheminots) continuera à être en déséquilibre dans l’avenir : affirmer que la suppression des régimes spéciaux résout le problème budgétaire, c’est de la poudre de perlin-points-points...
8ème idée reçue : La réforme permet de protéger les droits des plus faibles