Diminuer les protections attachées au CDI « va permettre de sortir du dualisme du marché du travail en autorisant les plus fragiles à accéder à un CDI dès lors que l’employeur n’aura plus peur du coût de la rupture » (Emmanuel Macron, La Tribune, 25 février 2016). Tel est l’argument du Medef repris aujourd’hui par le gouvernement pour faciliter les licenciements économiques.
Un CDI jetable
Les CDD représentent près de 90 % des embauches, et concernent surtout des jeunes qui enchaînent les contrats courts pendant des années avant d’arriver peut-être à un CDI. Mais le Medef et le gouvernement oublieraient-ils que 85 % des salarié·e·s sont en CDI ? Soit la même proportion qu’il y a 20 ans. Pensent-ils vraiment que faciliter le licenciement de ces 85 % permettrait de résoudre le problème des 15 % restant ?
Car le CDD, s’il est un contrat temporaire, est relativement protecteur pour le salarié : il ne peut pas être rompu par l’employeur (sauf faute grave), et il prévoit une indemnité de fin de contrat. D’ailleurs, le patronat veut briser le CDI, mais il a aussi assoupli le CDD, avec le « CDD de projet » (pour les cadres) et le « CDD d’usage » pour certaines professions (arts et spectacles, formateurs, cuisiniers...), beaucoup moins contraignants pour les patrons.
En instaurant le CDI jetable en cas de simple ralentissement économique ou de changement technique, on réduira peut-être le nombre de CDD, mais pas la précarité. Quel propriétaire de logement louera, quel banquier prêtera à un·e jeune qui vient juste d’être embauché·e en CDI ?
Des règles simples contre la précarisation
L’accroissement de la précarité ne s’explique pas par les rigidités du CDI mais par l’instabilité de l’économie soumise aux caprices de la finance et des banques. Faut-il taxer les CDD pour dissuader les employeurs d’y recourir ? Cela ne serait pas inutile. Il est vrai qu’une taxation des CDD, surtout les plus courts, existe déjà depuis plusieurs années sans avoir vraiment fait la preuve de son efficacité. Mais elle ne concernait presque pas le « CDD d’usage » (50 % des embauches en CDD) ni l’intérim.
Il faudrait surtout supprimer les « CDD d’usage ». On pourrait fixer un pourcentage maximum de CDD ou de contrats d’intérim possible par entreprise. Et enfin, tout simplement, appliquer l’actuel code du travail, qui réserve le CDD et l’intérim à des circonstances très précises (remplacement ou surcroît temporaire d’activité).