« Cette réforme va donner plus de moyens matériels aux acteurs sociaux et élargir très fortement le champ de la négociation » (Myriam El Khomri, Les Échos, 18 février 2016).
Le projet de loi Travail propose de permettre à un ou des syndicats minoritaires, représentant entre 30 % et 50 % des voix aux élections professionnelles, de demander qu’un projet d’accord, sur la durée du travail puis, bientôt, sur tous les thèmes, puisse faire l’objet d’un référendum d’entreprise. En cas d’approbation majoritaire des salariés, l’accord s’appliquerait. Quand bien même une majorité syndicale y serait hostile. La démocratie sociale, dit-on, en sortirait renforcée.
Un pistolet sur la tempe
En réalité, cette mesure vise à imposer, par le chantage à l’emploi, des décisions régressives pour les salarié·e·s : « acceptez des baisses de salaires, des jours de RTT en moins, une hausse du temps de travail, le travail du dimanche… sinon, ce seront des licenciements ! ». Surtout, cette mesure sous-entend que les organisations syndicales majoritaires ne sont pas vraiment représentatives des salariés. En opposant les salariés aux organisations syndicales, en contournant la représentation syndicale fondée sur les élections professionnelles, cette mesure ouvre une voie fatale. La droite l’a bien compris : elle promet de satisfaire la demande de la CGPME « que le référendum soit un outil de dialogue social qui puisse être utilisé librement [par les directions] » (Les Échos, 27 janvier 2016). Exit alors les syndicats… et la démocratie sociale ! Car si les syndicats n’ont plus à négocier et à signer les accords collectifs, ils perdent une de leurs principales raisons d’être dans les entreprises.
La démocratie a bon dos
L’entreprise capitaliste n’est pas un espace démocratique. Le patron, ou le PDG désigné par les actionnaires, est seul maître à bord. Le collectif de travail ne peut pas décider de l’organisation et de la gestion de l’entreprise selon le principe démocratique « 1 personne = 1 voix ». Sauf à abolir le droit de propriété privée des moyens de production. ce qui n’est bien sûr pas le projet du gouvernement ni du Medef.
En l’état, c’est donc la représentation syndicale qui donne sa consistance à la démocratie dans l’entreprise et c’est elle qu’il faut renforcer. En décidant qu’aucun accord collectif ne puisse s’imposer s’il ne bénéficie pas du soutien d’une majorité syndicale fondée sur les élections professionnelles.