Présentation du film
Octobre 2003 : Alma et Lila Levy sont exclues du Lycée Henri Wallon d’Aubervilliers pour le seul motif qu’elles portent un foulard. S’en est suivi un débat politique et médiatique assourdissant, justifiant dans la plupart des cas l’exclusion des jeunes filles qui portent le foulard à l’école. Février 2004, une loi finit par être votée par l’assemblée nationale, à la demande de Chirac...
Un racisme à peine voilé revient sur cette polémique depuis l’affaire de Creil en 1989 (où deux collègiennes avaient été exclues pour les mêmes raisons) et tente de "dévoiler" ce qui se cache réellement derrière la volonté d’exclure ces jeunes filles. Nous leur avons donné la parole. Ainsi qu’à d’autres [professeurs, militant(e)s associatifs(-ves), féministes, chercheurs(-euses)] regroupé(e)s autour du collectif "Une école pour tous-tes", qui lutte pour l’abrogation de cette loi qu’ils et elles jugent sexiste et raciste...
Durée du film : 75 minutes
Listes des personnes intervenant dans le film
– Saïd Bouamama (Sociologue, Enseignant à L’Université de Lille, auteur de "Vers une nouvelle citoyenneté. Crise de la pensée laïque")
– Georgette Hamonou (Enseignante, l’une des rares à avoir pris la défense des jeunes filles exclues de Flers en 1999)
– Saïda Kada (Écrivain, association Femmes Française et Musulmanes Engagées - Lyon.
Auteure avec Dounia Bouzar de « L’une voilée, l’autre pas - Le témoignage de deux musulmanes françaises ».
– Nacira Guénif-Souilamas(Sociologue.
Auteure de « Des « beurettes » aux descendantes d’immigrants nord-africains » )
– Pierre Tevanian (Professeur de philosophie à Drancy (93), Collectifs « Les mots sont importants » et « Une
école pour tou-te-s ».
Auteur de « Le ministère de la peur - Réflexions sur le nouvel
ordre sécuritaire »
– Nadia Louachi (Mouvement de l’Immigration et des Banlieues)
– Zahra AliI et Bashaer Shaaban (Lycéennes, Collectif contre les lois d’exclusion -
Rennes)
– Fatima Ali, Noor Ali, Aodren Le Duff et Marjolaine Peuzin (Étudiant-e-s, Collectif contre les lois d’exclusion -
Rennes)
– Fatima Aousti (Collectif « Voix de musulmanes » - Strasbourg)
– Radia Louhichi (Surveillante d’externat, Collectif « Une école
pour tous-tes »)
– Christine Delphy (Directrice de la revue « Nouvelles Questions Féministes », Directrice de recherche au C.N.R.S.,
Collectif des femmes pour l’égalité, Collectif « Une école pour tous-tes »)
– Willy Beauvallet (Collectif « Une école pour tous-tes -Strasbourg)
– Georges Federmann (Psychiatre - Président du Cercle Menachem Taffel - Secrétaire de Ras l’Front Strasbourg)
– Sandrine Vicente (Aide éducatrice dans l’éducation nationale (collège))
Propos extraits du film
« Quand on voit la télé et ce qu’on dit dans les journaux, et que moi je vois ces filles-là tous les jours......je me dis non, y
a un problème »
« On nous parle de l’Afghanistan, de l’Algérie... [...], on nous montrait pas nous, on nous donnait pas la parole. On
entendait cet écrivain iranien parler de l’Iran. Mais ça n’a rien à voir avec nous : je suis citoyenne française ! »
« Depuis que je suis petite, on ne m’a jamais considérée comme une française à part entière »
« [L’intégration] c’est un certificat de bon indigène ! »
« On est sans arrêt suspectées d’être de faux citoyens, de semer le trouble dans la république, de vouloir créer un « Etat
Islamiste », on parle même de l’internationale islamiste !....moi j’en ai jamais entendu parler de ce congrès-là..... »
« Si on veut lutter contre l’intégrisme, on mène une politique contre les groupes intégristes, et pas contre des gamines de
15 ans... »
« Moi, je soutiens les putes, les soumises et les voilées....de tout coeur, elle a besoin de quelque chose, elle vient me
voir ! Je suis là »
`
« C’est un panneau dans lequel beaucoup de féministes sont tombé(e)s cette demande de répression envers les
femmes. Pas seulement celui-là, mais aussi le panneau de favoriser le symbole au détriment de la réalité. [...] Des
symboles, il y en a à la pelle, et celui-là ne me dérange pas plus que les autres. [...]. Ce qui nous dérange vraiment c’est
d’être payées 25% de moins que les hommes, de se taper 80% du travail domestique, c’est d’être achetées et vendues
comme des marchandises, c’est d’être battues, c’est d’être tuées... »
« Je suis anticlérical [...]. Mais la lutte contre les religions si on considère qu’elles sont aliénantes, elle ne peut pas se
faire au mépris des individus. On peut pas dire aux gens que leur religion est inutile, qu’elle les fourvoie et que donc ils
auraient intérêt à l’oublier pour passer à un stade révolutionnaire actif !!... »
« On a placé le débat de façon tellement abstrait, qu’on a le sentiment de combattre des foulards et non pas des gens
derrière... »
Note d’intention, par le réalisateur, Jérôme Host
"Documente toi un peu avant de claquer ton fric et ton temps dans la réalisation d’un film aux relents
nauséabonds du fascisme politique et religieux !!!"
Voilà le genre de message que nous avons eu le plaisir de
recevoir pendant la réalisation de notre film. Le ton définitif de
cette agression verbale n’aurait nullement retenu notre attention
s’il avait était l’oeuvre d’un vulgaire groupuscule d’extrême droite.
Le choc aurait été largement tout aussi amorti si la vomissure était
venue de l’estomac d’un(e) militant(e) local(e) dévoué(e) au
chiraquisme, ou encore d’une âme égarée par de trop nombreuses
années de relations télévisuelles avec TF1 sans préservatif.
Mais
rien de tout cela. Cette crise d’hystérie venait tout droit de
personnes qui en d’autres circonstances et sur d’autres terrains,
sont les pourfendeurs les plus radicaux de l’exclusion qu’elle soit
sociale, politique ou à caractère raciste. C’est bien d’un groupe
d’une tendance de " gauche " que le message nous était parvenu.
Cela rappelle étrangement ces débats de l’entre deux
tours des fameuses présidentielle de 2002, ou quiconque osait émettre un doute sur la nécessité absolue de crier "aux
urnes !" pour que l’ange Chirac nous délivre du mal, était automatiquement cloué au pilori. Pourtant le "bruit " des
discours sécuritaires de la campagne électorale "et l’odeur" malsaine du choix qui nous était imposé auraient peut-être
bien mérité plus de débat...
Ces provocations n’ont fait que nous motiver davantage dans notre volonté de comprendre ce qui se cache
derrière cette "divine" croyance en l’exclusion comme solution au "problème du foulard à l’école".
La raison pour laquelle nous avons décidé de "claquer notre [peu de] fric et notre temps" (ça on en a déjà plus)
dans la réalisation de ce film c’est précisément parce que nous nous sommes documentés. Nous voulons dire que nous
avons cherché au-delà des émissions d’Arlette Chabot ou de Charles Villeneuve. Mais cela ne suffit pas, il faut aussi
rencontrer, discuter, se confronter... Bref tout ce que la majorité de celles et ceux qui ne voient dans le foulard qu’un
horrible instrument de torture imposé aux femmes, un marquage insupportable de la soumission aux hommes, se
refusent à faire.
Mais comment considérer ces jeunes filles comme des "victimes" tout en réclamant pour elles des sanctions ? Étrange féminisme que celui développé par les partisan(e)s de l’exclusion. Il nous semble bien plus féministe de défendre
les droits des femmes, de toutes les femmes, qu’elles soient considérées comme " putes ", " soumises ", et autres.
Nous faisons ou avons fait partie pour plusieurs d’entre nous de l’encadrement pédagogique de l’éducation
nationale.
L’entreprise de désinformation au sujet du foulard islamique, inaugurée par Sarkozy au congrès de l’UOIF(Union
des Organisations Islamiques de France) en avril 2003, nous est apparue d’autant plus flagrante que nous côtoyons
quotidiennement ces jeunes filles. Il est clair que les motivations liées au port du foulard sont diverses et variées.
Restait encore un point à clarifier : comment, en tant qu’athé(é)s à tendance plutôt anticléricale, pouvions nous
réaliser un film qui propose un contre discours à l’interdiction du foulard islamique à l’école ? Est-il possible de défendre
une position laïque et pour autant contre l’exclusion des filles portant le foulard à l’école sans risquer d’être taxé de "pro-voile" ou bien encore "d’islamophile" ? Nous espérons que oui. La laïcité selon les textes fondateurs de 1881. 1882 et
1886 impose une neutralité des locaux, des programmes, des enseignant(e)s, mais pas des élèves. Ce qui paraît
pourtant évident : On ne naît pas laïque ! Quand à la critique des religions, elle ne peut se faire au mépris des individus
qui les pratiquent. S’attaquer à des adolescentes et leur refuser le droit à l’éducation sous prétexte qu’elles portent un
symbole de religiosité n’a rien d’anticlérical : c’est tout simplement lâche.