On ne sait ce que sont, précisément, les signes distinctifs de cet art de vivre qu’il convient de capitonner : est-ce, par exemple, « notre » si récente – c’était dans le siècle dernier – et si furieusement européenne propension à perpétrer, dans les limites d’un continent comme dans le plus vaste cadre d’expéditions coloniales, de monstrueux génocides ?
Ou bien : serait-ce « notre » difficulté, aujourd’hui, à ne pas hérisser ledit continent de camps (de rétention) et de barbelés, de Calais à Kübekháza ?
Ou bien encore : la facilité avec laquelle, dans l’espace de quelques années, nous avons laissé se noyer dans « notre » si chère et si précieuse Méditerranée, ô-berceau-de-tant-de-civilisation(s), des dizaines de milliers de réfugié·e·s – pour mieux nous gargariser d’en accueillir parfois trente, sur cent qui errent de port en port, chassés de partout, refoulés d’ailleurs ?
Cela n’est pas dit.
Mais on sait du moins, et en revanche, contre qui et contre quoi il doit ainsi être protégé, car M. Schinas, qui est en charge de l’éducation et de la culture, « supervisera aussi les questions migratoires » [2].
Dans l’esprit des gens (disons comme ça pour ne pas basculer dans la grossièreté) qui ont confectionné cet intitulé appelant à le « protéger », ce sont donc les migrations, qui menaceraient « notre » scintillant « mode de vie » – et non le détricotement continu de nos sécurités sociales par cette (même et) si protectrice Europe.
C’est contre les migrant·e·s, qu’il faudrait se cuirasser – exactement comme dans les divagations xénophobes de MM. Camus (Renaud) et Zemmour (liste non exhaustive).
Et M. Macron (le très cauteleux M. Macron, qui continue cependant, lorsqu’il n’est pas occupé à accepter à Bruxelles le soutien de M. Orban, à se poser en dernier rempart contre l’extrême droite) s’y emploie, sans mesurer sa peine – à moins que ce ne soit sa Pen. Car c’est sous sa houlette que, dans le moment précis où les Talibans bombardent Kaboul, « la France veut accélérer les expulsions d’Afghans » [3] vers « un pays où la situation sécuritaire s’est » donc, comme le souligne Amnesty international, « encore aggravée » : preuve, s’il en fallait, que son Europe sait aussi protéger des modes de mort.